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Jacques traça un hexagone, et brouillon, inscrivit la première des doubles liaisons à droite de la figure.

— Partons du noyau benzénique…

Monsieur Legris l’interrompit, pointu :

— Depuis quand inscrit-on à droite la première double liaison du noyau ?

Bon, encore une manie. Il fallait calquer les développements de Monsieur Legris.

— Mais, Monsieur Legris, pour retrouver votre développement dans sa pureté, on n’a qu’à regarder par en-arrière du tableau.

Monsieur Legris se rengorgeait.

— Ah ! mais, mais…

— Et je vous prouve que je comprends vos formules ; je jongle avec elles !

Les boutades, surtout lorsqu’elles prennent cet air effronté, n’ont rien à voir avec la chimie de Monsieur Legris. De son index crayeux, le maître indiquait le corridor :

— Jacques Richard, chez le Père Préfet !

C’était un triomphe. Jacques s’était comme libéré d’une masse de rancœur, de rancœur non pas contre Monsieur Legris, contre personne plutôt ou contre tout le monde. Marc et Tristan, soucieux, regardaient leur ami passer la porte.

Le Père Préfet n’était pas chez lui. Jacques flâna par les corridors. Au tournant de l’escalier, il heurta presque le Père Vincent, le Père Spirituel. C’était un gros homme plein de jouvence, chauve, de petits yeux bridés riant derrière d’épaisses lunettes de corne noire.