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entre les deux femmes. Je me doutai après l’histoire de Xénia de la forme du cachot dans lequel on allait l’enfermer. Tania ne paraissait pas trop rassurée, elle demandait à s’en retourner avec nous, protestant qu’elle ne crierait pas. Mais on la laissa attachée, et la modiste m’entraîna dans sa voiture, qui nous attendait à la porte. J’eus le feu au derrière toute la nuit.

Le lendemain Tania ne reparut pas. J’échangeai un coup d’œil avec la grande fille. Je lui racontai dans la journée ce qui s’était passé. Elle ne reparut pas non plus le surlendemain, ni les jours suivants.

Elle resta huit jours sans se montrer à l’atelier, et quand elle revint, c’était pour nous faire admirer l’élégante toilette qu’elle tenait, nous dit-elle, d’un oncle qui la protégeait. Nous lui rîmes au nez, sachant bien que son oncle était un vieux général retraité, à qui il fallait des tendrons pour réchauffer son vieil outil ratatiné.

Ce luxe dura trois mois. Le vieux général en eut assez après quinze jours, et encore pendant les huit derniers jours, elle était obligée de l’achever avec les lèvres