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Mémoires d’une Danseuse russe

que si j’avais été le médecin en chef et lui simplement mon aide.

Pour bien des gens qui ont une opinion spéciale sur les médecins de prison russe, le Dr A… aurait été, sur presque tous les points, le sujet d’un grand étonnement. Sa dignité, sa courtoisie, son éducation raffinée faisaient penser que, sans des circonstances accidentelles et que lui seul pouvait connaître, il eût été fait plutôt pour être un célèbre médecin recherché des dames à Moscou ou à Saint-Pétersbourg.

Quand je n’étais pas pris par d’autres soins, c’était en son agréable société que je passais ma matinée.

Un samedi, comme nous sortions, le Dr A… et moi, de l’hôpital plus tôt que de coutume (je ne savais pas pourquoi), j’observai, chose qui ne lui était pas familière, qu’il fronçait les sourcils et marchait les yeux fixés à terre, droit devant lui, paraissant très préoccupé.

D’un ton plaisant, je lui dis : « Mon cher docteur, on dirait que vous pensez à quelque chose que vous avez devant vous ». Il fixa d’un regard comique les deux premiers boutons de son gilet bien rempli,