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Mémoires d’une Danseuse russe

distance, j’observais la contenance de la petite esclave. Par instants, quand le poids des talons se faisait sentir trop douloureusement, elle essayait par un lent et presque imperceptible mouvement de donner à son corps une position meilleure ; mais presque toujours sa maîtresse s’en apercevait aussitôt ; d’un coup de pied vivement appliqué, elle lui meurtrissait le dos, le bas des reins ou les jambes. Macha reprenait alors son immobilité, la tête posée sur ses bras croisés.

Ces châtiments se répétèrent une demi-douzaine de fois pendant la durée de l’exercice ; Mademoiselle les accompagnait de sèches réprimandes : « Veux-tu te tenir immobile ! » « Tu seras punie tout à l’heure ! » etc.

Après avoir quitté son piano (la musique, chez elle, ne paraissait pas adoucir le caractère), elle dit à sa victime :

— Relève-toi ; je t’ai promis de te punir et tu sais, par expérience, que je tiens mes promesses ; tu vas aller à l’office pour y recevoir vingt coups de martinet.

La pauvrette sortit en sanglotant ; elle fut de retour quelques minutes après, ses yeux remplis de larmes.