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Le Servage en Russie sous Nicolas Ier

je désirais me coucher tout de suite, et, sur ma réponse affirmative, se mit en devoir de me dévêtir. Très adroite, elle eut tôt fait de me passer ma toilette de nuit. J’allais me mettre au lit, lorsque je remarquai pour la première fois combien il était élevé au-dessus du sol de la chambre. Je cherchais des yeux un petit banc ou un coussin pour y grimper lorsque Ourita, qui avait saisi mon léger embarras, sourit et s’accroupit tout auprès en me tendant son dos.

— Que fais-tu donc ? m’écriai-je.

— Oh ! Mademoiselle, vous ne pourriez atteindre votre lit sans mon aide.

— Comment peux-tu croire que je vais me servir de toi comme de marche-pied ? répliquai-je.

— Mais, mademoiselle, les caméristes le font tous les jours pour mes maîtresses ; vous verrez que c’est très commode.

J’étais stupéfaite et, de nouveau, la pensée que j’en verrais de drôles dans ce château passa dans mon esprit.

« Puisque c’est la coutume, me dis-je, après tout, n’hésitons pas, » et le plus légèrement possible je posai mon pied sur le dos d’Ourita, et, d’un bond, je fus au lit.