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Mémoires d’une Danseuse russe

de soie bleue, plus pâle. Elle était parée de nombreux bijoux : des saphirs aux oreilles, un collier de deux rangs de perles, deux bracelets d’or mat aux poignets et plusieurs bagues à chaque main. L’ensemble de cette jeune personne en imposait ; je ne pus m’empêcher de l’admirer et d’être émue par la beauté qui se dégageait d’elle.

Madame sonna. Une jeune serve en jupe courte, tête nue, bras nus, les cheveux nattés tombant dans le dos, en bas de coton blanc et en souliers de cuir noir, vint se ranger debout derrière sa jeune maîtresse. Dès le début du repas, je vis que celle-ci était extraordinairement gâtée. Les parents la couvaient des yeux, riaient de ses moindres saillies en lui laissant mener la conversation sur le ton qui lui plaisait. La fille qui la servait prévenait ses désirs, lui versait à boire, enlevait prestement les assiettes vides, prenait les plats des mains de la cuisinière et les lui passait d’abord, épiant sur le visage de sa maîtresse ses moindres volontés avant qu’elles n’aient le temps de se manifester. « Voilà une servante bien stylée », pensai-je. Je ne fus pas longtemps à me rendre compte de l’intérêt qu’avait cette servante si bien dressée à ne pas fauter. En prenant