Page:D. - La Flagellation en Russie - Mémoires d'une danseuse russe, 1905.djvu/148

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
130
Mémoires d’une Danseuse russe

C’était d’abord le tour des coiffeuses. La dame, confortablement assise dans un fauteuil au dossier peu élevé, enveloppée dans un peignoir de satin, livrait sa chevelure de soie dorée aux mains des spécialistes qui avaient fait leur apprentissage aux dépens de leur croupe chez une modiste de la ville.

Les coiffeuses non plus ne sortaient jamais indemnes de cette séance. Il leur aurait fallu une adresse de fée et encore avec l’adresse, le pouvoir de se rendre invisibles et impalpables pour se soustraire aux effets de la colère stupide de leur maîtresse. Quand le démêloir tirait un peu sur les cheveux de cette mégère, elle prenait la coiffeuse par cette petite mèche qui s’enroule en tire-bouchon à la hauteur de l’oreille, et elle la secouait, la tête allant de droite à gauche à la faire pleurer. Quelquefois c’était par les oreilles qu’elle les prenait, les pinçant dans ses doigts en les secouant. Le plus souvent c’était la pantoufle qui cinglait la joue ou la gorge. Ces deux soufflets d’une semelle de cuir étaient très douloureux.

Une jeune fille, à genoux devant la boïarine, lui servait de psyché vivante, élevant ou inclinant une grande glace ronde qu’elle tenait dans ses mains,