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CÉSAR FRANCK

de saveur à peine sensible, cependant bien personnelle, qui devint postérieurement le parfum typique de la mélodie franckiste. Telle, la future souffrance perçant parfois à travers la trame mélodique toute mozartienne des premières œuvres du maître de Bonn.

Ce ne fut que vers la deuxième étape de son style que Franck sut enfin faire sien et originaliser (qu’on excuse ce néologisme) ce tour mélodique qu’il avait reçu des Français, ses maîtres aimés, et qui, sous l’influence de Bach, de Beethoven, de Gluck, en arriva à devenir — depuis les premières pièces d’orgue jusqu’aux Béatitudes — cette mélodie si génialement personnelle dont je parlais plus haut et que nul critique avisé ne saurait confondre avec une autre.

Continuant l’historique de ses prédilections, je dirai que certaines grandes œuvres avaient pour lui la signification de beauté absolue et qu’il lui arrivait parfois de s’absorber en leur contemplation au point d’oublier toute contingence. Henri Duparc se souvient encore de quelques leçons de piano au collège de Vaugirard, passées tout entières à l’enthousiaste lecture par le maître, d’un acte d’Iphigénie en Tauride, de pièces d’orgue de Bach ou de certains passages d’Euryanthe… Une fois l’heure de la leçon terminée, le pauvre professeur était