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L’ARTISTE ET L’ŒUVRE MUSICAL

pression et de grâce, Dalayrac, dans les opéras duquel il chercha des thèmes pour ses premières fantaisies de piano[1], Grétry, dont il ne pouvait, même dans son âge mûr, relire certains passages sans éprouver une réelle émotion, Méhul surtout dont le Joseph le transportait d’admiration : « Comment décrire sa joie », écrit M. Arthur Coquard[2], « comment décrire son enthousiasme, un jour que le hasard remit sous ses yeux l’admirable duo de la jalousie, d’Euphrosine et Coradin ? Il le chanta plusieurs fois de suite avec transport ; et je le vois encore se lever et me dire tout ému : Voilà de la musique dramatique… et de la musique par-dessus le marché ! »

Et, en effet, pendant la longue période de près de vingt années qui constitue la première manière d’être de son talent, il n’est point rare de rencontrer dans l’inspiration mélodique comme un souffle de l’auteur de Stratonice. Certains thèmes du premier et du quatrième trio, celui de la ballade en si majeur pour piano, de nombreuses pages de Ruth et même d’œuvres postérieures pourraient presque passer pour des motifs de Méhul, si l’on n’y remarquait point déjà une sorte

  1. Deux fantaisies pour piano sur Gulistan. (V. le Catalogue).
  2. César Franck, par A. Coquard, brochure parue en 1890 et rééditée en 1904 au Monde musical.