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CÉSAR FRANCK

que le devoir, en Art, n’existe pas. — Il n’y a pas plus de devoir de composition musicale que de peinture ou d’architecture, tout ce que l’on produit dans la ligne de l’art doit être, non un pensum journalier, mais le résultat d’une souffrance dans laquelle le jeune artiste a laissé un peu de son cœur, et à l’expression de laquelle il emploie toutes ses facultés intellectuelles. Le système de faire produire beaucoup à l’élève sous prétexte de lui « faire la main » est donc fort médiocre pour la plupart des élèves, car il les habitue à écrire n’importe quoi et à se contenter de tout ce qui tombe de leur plume pourvu que le résultat soit copieux ; en travaillant de cette façon, ils ne se doutent jamais du rôle primordial joué par cette portion de la faculté intelligence qu’on appelle le goût et qui est appelé à déterminer le choix des matériaux à employer ainsi que leur bonne ordonnance, et c’est à cette erreur que l’on doit attribuer la production de ces œuvres aussi compendieusement pensées qu’inutiles à l’art, qui sévissent tant sur les scènes lyriques que dans les salles de concert de France, d’Allemagne et d’Italie.

« Écrivez peu, mais que ce soit très bien, » nous disait le père Franck, et la force de son école a été de ne point se départir de ce précepte.