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CÉSAR FRANCK

Mais qu’on ne croie pas que ce fût par vanité ou présomption que le maître rapportât ses jugements à ses propres sentiments de sympathie ou d’antipathie ; bien loin de sa pensée l’arrogante affirmation du critique d’art déclarant sentencieusement après une seule audition — parfois distraite — : « Telle œuvre est sublime, telle autre est ratée… » ; le père Franck ne savait point juger avec une pareille désinvolture, il écoutait, relisait, plaidait le pour et le contre et ne formulait son opinion que lorsque, s’étant attentivement scruté lui-même, il était sûr d’être en communication intérieure avec la Beauté et de parler au nom de la Vérité non relative mais absolue.

Car — nous ne le savons que trop, nous, hommes de la fin du XIXe siècle — ce n’est point par la haine que la Vérité peut se manifester jamais, et tous les monstrueux : « J’accuse » sont et resteront impuissants auprès du simple : « J’aime » du père Franck.

« Aimer, sortir de l’égoïsme, de soi-même, en s’aimant en quelque chose de très supérieur, de très inconnu peut-être, mais à l’existence de quoi l’on continue à croire, de quelque nom qu’on le nomme : voilà bien le fond et l’essence de la vraie méthode, celle que Platon recommandait aux dévots de la Vénus céleste,