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LUDWIG VAN BEETHOVEN

a lues ? Recueil de traits de piano sans intérêt, cette sonate qui semble écrite en vue d’une virtuosité spéciale, est bien la production la plus insignifiante de toute la deuxième époque. Cette manière de voir se trouve confirmée par la découverte qu’a faite M. de Gérando, d’une longue correspondance amoureuse entre sa grand’tante Thérèse de Brunsvik et un certain Ludwig Migazzi, orientaliste distingué. Du propre aveu de Thérèse, « cette passion avait consumé son cœur ». La publication des mémoires de la comtesse où le nom de Beethoven est cité si rarement, vient d’ailleurs corroborer cette opinion[1].

Mais, dût-on même apporter, à l’appui de la légende des fiançailles, des documents plus sérieux que le récit fantaisiste écrit, dit-on, par une femme de chambre, nous répondrions : Non, cent fois non ! ces deux morceaux de piano sans velléité expressive, sans intérêt musical, ne sont pas, n’ont jamais pu être l’hommage du titan Beethoven à son « immortelle bien-aimée ». Tout ce qui est Musique s’élèverait pour en témoigner !

On fera bien d’observer à ce propos le rôle important et très significatif joué par la dédicace dans l’histoire de l’art beethovénien. Ce n’était jamais à la légère que le maître de Bonn inscrivait un nom en tête d’une œuvre. Cette source documentaire est des plus instructives.

À part quelques hommages obligés et traditionnels à des personnalités souveraines, tous les ouvrages importants qui sortirent de la plume de Beethoven — il n’y a

  1. Un opuscule de M. de Hevesy, récemment paru, fait ressortir la fragilité des hypothèses si ingénieusement construites par les musicologues allemands au sujet des prétendues amours de Beethoven et de Thérèse.