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LUDWIG VAN BEETHOVEN

vage, sans ordre, sans force esthétique, sans beauté[1]. »

C’était aussi l’avis de Beethoven. Il professait également l’opinion que cette acquisition de la « culture suffisante », dont parle Dittersdorf, ne peut être que le résultat d’un travail préliminaire très long et très consciencieusement accompli. Aussi, séparait-il absolument de ce travail nécessaire, l’étude de la composition proprement dite : « Pour devenir un compositeur », disait-il, « il faut avoir déjà étudié l’harmonie et le contrepoint pendant une durée de sept à onze années, de façon à s’être accoutumé à plier son invention aux règles, lorsque s’éveilleront l’imagination et le sentiment. » Au Dr Pachler, qui lui présentait un manuscrit à examiner, le maître répondait que « c’était très bien pour quelqu’un qui n’avait jamais appris à composer, mais qu’après une étude approfondie de la composition, l’auteur parviendrait à discerner ses nombreux défauts ».

Et c’est ainsi qu’après plus de vingt ans d’une carrière déjà remplie de chefs-d’œuvre, Beethoven pouvait dire, à l’aube de sa quarante-septième année : « Maintenant, je sais composer ! »

Comment cet état de réflexion que nous avons constaté chez Beethoven et qui vient d’aboutir à la certitude de « savoir composer », va-t-il se traduire en musique ? — Ce sera par un retour manifeste et conscient vers les anciennes formes traditionnelles. — Qu’on ne se méprenne pas sur la signification de ces mots : retour à la tradition. Loin de nous la pensée de vouloir soutenir que Beethoven revient, en pleine maturité, à une imitation servile des types musicaux en usage chez ses aînés ou

  1. Traduction de M. P. Magnette.