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compte, aperçu aucune différence, il disait souvent des unes : « Voilà des gens comme il faut, tout à fait bien nés, des personnes de qualité, de véritables grands seigneurs ; » et des autres : « Ce sont des gens qu’on ne connaît pas, des gens de rien, de moins que rien. » Cette façon de penser et de s’exprimer était chez lui habitude de jeunesse ; il n’y avait, de sa part, nulle intention offensante. Sur ce chapitre de la noblesse comme sur tous les autres, mon père était simple et tout uni. Sincèrement modeste, pour ce qui le regardait, et plutôt philosophe, il méprisait sincèrement et bafouait, à l’occasion, les puériles préoccupations et les sottes vanités.

Voici ce qu’à plusieurs reprises, sans suite, et à bâtons rompus, je lui ai entendu dire de notre famille. Il la tenait pour très-ancienne et considérable. Je ne lui étais pas agréable quand je lui disais que, après tout, ce n’était pas une famille historique, ce qui, en fait de noblesse, me paraissait le point essentiel. Il n’en convenait pas, et me répondait qu’elle a été souvent nommée dans l’histoire, particulièrement dans les annales de la Lorraine. On trouve, en effet, dans l’histoire de René d’Anjou, par M. de Villeneuve, un sire Jehan d’Haussonville qui, dans un Conseil tenu entre les principaux de l’armée, opine fièrement, contre l’avis des plus expérimentés, pour qu’on livre bataille. Le lendemain, il paraît qu’il avait changé d’avis, car il