jeunes sanglots, et triste, le front bas, l’oreille attentive aux tip tap de la cavalcade qui fondait dans la nuit venante, le Béarnais, seul sur la route, écouta s’enfuir son amitié.
Revenu dans son désert, à ses livres, une faiblesse arrêta ses doigts : les pages chantaient toujours, le cœur usé n’entendait plus. Il en pensa revivre l’ancien battement : Larochefoucauld, Ségur devinrent ses fidèles, mais d’Aubigné occupait son âme délicieusement. Sans ressort, sa vie traina. Lentement il se laissa gâter, prit d’injustes fureurs sans cause, ronfla quelque peu dans le jour et mollit. Il jurait à la courtisane par mordieux, têtedieux, milliers de sangdieux, et c’est pour rendre cette habitude inoffensive que La Gaucherie, avisé, inventa ce Ventre-Saint-Gris qui n’offensait que la raison. Ce retour par la traverse à de plus modestes langages fut le seul bien des années mortes qu’il passa loin de son ami. Après le décès de son précepteur, les gentilshommes gascons groupés en conseil pensèrent qu’il était grand temps d’isoler leur prince de la cour, et la reine de Navarre aussitôt prévenue vint à Paris pour le ramener en Béarn. Il avait treize ans.
L’errante maisonnée s’achemina sans croix ni pile, à la mode des cadets, du pain et de l’ail dans ses bissacs, néanmoins fière, hanchée sur ses courts chevaux, et plaisante en dits ; — gagna Nérac et y prit-demeure.