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L’ENFANT

— Ce petit moricaud n’est que tempête, il faudra le veiller.

Mais la grande ville maligne s’en amusa, l’enfant plut aux Parisiens.

— Et tiègne ! éclataient de vieilles poissonnières, voilà notre mangeur d’ail qui part au collège !

Quelque tavernier s’avançait, hardi :

— Si Son Altesse a soif…

— J’ai un trop beau nez pour ne pas boire, souriait le prince.

Il vidait le blanc de Bagneux jusqu’au dernier glout, et suivi de ses gens confus rentrait en classe.

On l’adora.


Cependant, à la longue, le nombreux contact du collège le dégoûtait. Au lieu de s’assouplir, il raidit. Il avait trop d’angles sortants. Ses mots, ses gestes, ses pensées, s’ils ne blessaient plus, éloignaient de lui, avec les trois princes, la jeune masse de cette vaniteuse noblesse uniquement préoccupée déjà de cérémonies. Les professeurs, à leur tour, dont la robe cachait à peine les mignonneries courtisanes, remontrèrent avec gravité à ce princelet de neuf ans, quoiqu’il fut le plus « ententif », les écarts de ses manières, ses fautes contre l’usage, la mode, l’âpre goût de ses réflexions, la brutalité de son vivre et de son sonore parler. Il souffrit, écouta pieusement ce nouveau langage, et voulut comme les autres