silencieuse, la petite reine de futaine, la Dame de Navarre ne voyait rien : les villes avaient beau passer sous son cheval, ni fêtes ni discours ne l’otaient des craintes du testament de son père, et par les chemins du soir, tristes, s’égrenaient ses pensers brumeux… Auss i, la première question qu’elle fit à son père, un jour que rentrée à Pau elle causait avec lui en un cabinet, fut de lui demander, caressante, ce qu’il avait fait de ce dangereux testament. Le roi rude tira de ses coffres une boîte d’or :
— Je te la donnerai, Jeannoun, avec le testament qui est dedans, le jour où tu feras ce que je vais te demander.
— Et que faudra-t-il faire, monseigneur, pour détruire ce qui serait notre honte à mon enfant et à moi ?
Le vieux d’Albret prit les poignets de sa fille, et lui expliqua, lent, les dures conditions. Aucun témoin. Les murs eux-mêmes n’eussent pu entendre. Les paroles de ce contrat fondirent au feu du cœur de la reine ; et hagarde, les mains sur son pauvre ventre, elle eut peur du vieillard féroce :
— Oh ! cria-t-elle, non ! Je ne pourrai pas… jamais ! Non ! non !
— Tu obéiras ! dit rageusement le Pyrénéen. Lorsque tu naquis, ma fille, les Espagnols dirent de ta mère : « Voyez ! la vache a enfanté une brebis. » Eh bien ! je leur écraserai l’injure aux dents ; je veux qu’ils disent bientôt, lorsque ton