Page:D’Esparbès - Le Roi (1910).djvu/125

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
105
L’HOMME

— Je n’ai point à vous convertir ni à démêler vos fumées. Je ne le voudrais point, car je vous sais pour francs hommes, d’opinions sincères et vigoureuses, et m’en remets à l’expérience qui vous fera connaître dans l’avenir qui de nous eut le mauvais jeu. Les divers avis, par surplus, m’ont semblé toujours excellents par la pique amicale dont ils excitaient notre cœur. Restez donc sur vos réflexions, voici les miennes.

Immobile, il toucha les fronts des secrétaires :

— Avant tout, en vous écoutant, m’est venu d’abord à l’esprit que nous représentions à nous trois les races mères dont fut élaborée au commencement de l’histoire l’âme de ce pays-ci. (Il secoua la tête de Rosny) Ce bavard est Allemand. (Le Gascon bourra d’Aubigné) Cet autre est Gaulois.

Après un silence :

— Et moi Latin.

Il sourit.

— Ainsi logé entre « monsieur et madame », je ne me dénouerai pas la hanche à vous bouter hors du lit commun, il est assez grand pour tous : c’est la France elle-même. Chacune de ces trois races a déposé sur le sol le blot d’instincts qu’elle amenait avec elle. Mais il m’apparaît à vous entendre que l’union de ces races n’est point faite encore, et qu’au lieu de simples Français il y a ici…

Au geste des secrétaires, il pressa le sol de sa botte :

— Me laisserez-vous finir ! Vous avez fait chacun