Page:D’Esparbès - Le Roi (1910).djvu/122

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
102
LE ROI

Ils l’aidaient chaque soir à se dévêtir. Le héros s’exhalait de sa chrysalide de mailles.

— Il n’est rien de vrai que les images ! chuchota d’Aubigné rêveur. Lorsqu’on posa la couronne sur la tête du nouveau roi, il dit assez haut qu’elle le blessait, et lui coula du front par deux fois comme si elle eût voulu tomber. C’est augural.

— Poète, souriait Henri.

Débarrassé, à l’aise, le Gascon s’asseyait avec ses amis ; et lorsqu’ils n’avaient pas écritures, leurs causeries épuisaient le temps.


Quoique de sujets divers, elles revenaient toutes au même but. La préoccupation de ces trois hommes était la France, sa gloire, sa paix. Le pain des hameaux d’abord, joie universelle. Puis l’industrie, le commerce, les arts des villes, sources de la force, de la richesse et de la pensée nationales ; la vieille question du bonheur humain, un rêve qu’ils débattaient dans la solitude, à voix nerveuses et prudentes, unis, amicaux, enfants, les mains dans les mains, le roi entre ses deux conseillers, entre un calculateur et un poète : Rosny le futur Sully, et d’Aubigné.

— Parlez l’un après l’autre, disait le Gascon, et que le plus jeune des deux commence ; s’il discourait après, la hardiesse de ses conseils pourrait s’en gâter, et il n’est de franchise que libérée de la gêne. À toi, Rosny.

— Sire, dit le secrétaire, vous connaissez mes