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C’eſt à un Philoſophe à diſcuter la Vérité d’une Opinion. Un Hiſtorien n’eſt pas fait pour entrer en Controverſe. Tout ce qu’on doit éxiger de lui, c’eſt qu’il faſſe ſentir, qu’il n’a que peu ou point de Croïance à ce qu’il rapporte.

Il en eſt peu, qui obſervent éxactement cette Maxime. La plûpart, après avoir aſſuré un grand Nombre de Choſes, ou fauſſes, ou ridicules, propoſent ſur quelques-unes un Doute aſſez inutile, & d’autant plus pernicieux à leurs Lecteurs, que leur Bonne-Foi dans cette Occaſion ſemble autoriſer les Menſonges qu’ils ont approuvez[1].

Pour vous perſuader, Madame, l’Incertitude qui regne dans l’Hiſtoire, je vais d’abord vous faire voir : I, l’Obſcurité dont elle eſt couverte dans ſes Commencemens : II, la Partialité qu’on voit dans les Hiſtoriens, lorsque les Tems

    C’eſt leur Rolle de réciter les communes Créances, non pas de les regler. Cette Part touche les Théologiens, & les Philoſophes, Directeurs des Conſciences. » Montagne., Eſſais, Livr. II. Chap. VIII.

  1. Illi cum multa mentiti sunt ad arbitrium suum, unam aliquam rem nolunt spondere sed adiciunt, Penes auctores fides erit. Seneca, Natur. Qæſt. Libr. IV. Cap. III.