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Un autre Aſtrologue, apellé Morin, fort piqué contre Gaſſendi, qui ſe mocquoit de ſes Prédictions, & qui mettoit en évidence la Fourberie de ſon Art, voulut rétablir ſa Réputation delabrée aux dépens de Gaſſendi. Il choiſit le Tems où ce Philoſophe etoit incommodé d’une Fluxion très dangereuſe ſur la Poitrine : &, Croïant qu’il n’en guériroit point, il fut aſſez impudent, pour faire imprimer & répandre dans le Public, que Gaſſendi, qui frondoit ſi fort l’Aſtrologie Judiciaire, mourroit vers la Fin de Juillet ou au Commencement d’Août de l’Année 1650. L’Aſtrologue crut étonner le Philoſophe par cette Prédiction. Mais, celui-ci, non content d’avoir donné des Raiſons contre l’Aſtrologie Judiciaire, voulut encor y joindre des Preuves évidentes de ſa Fauſſeté. Car, il reprit ſi bien ſes Forces, qu’il ne ſe porta jamais mieux que dans le Tems que l’Aſtrologue l’avoit condamné à être immolé à la Réparation du Tort qu’il avoit fait à ſon Art. Si Gaſſendi fût mort par hazard, voïez, Madame, quelle devenoit la Réputation de l’Aſtro-

    ſon Fils. Il l’avertit par un long Ecrit de ce qui lui devoit arriver, & ne lui parla jamais qu’on le pendroit à vingt-quatre Ans, pour avoir empoiſonné ſa Femme.