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Et quant aux Sentimens de quelques Hiſtoriens & de quelques Poëtes, grands Amateurs de Prodiges, je vous ai fait voir dans ma prémiere Réfléxion combien on doit y avoir peu d’égard. En effet, ſi l’on écoutoit tous les Contes que débite ridiculement un Nombre de Génies ſoibles, & peu éclairés par la bonne Philoſophie, il faudroit, par la même Raiſon, autoriſer les Superſtitions & les Fables de toutes les Vieilles. On n’oſeroit plus ſe mettre à Table, lorſqu’on ſe trouveroit treize à la fois : & l’on ſeroit dans l’Attente des plus grands Malheurs, dès qu’on auroit renverſé une Saliere, ou caſſé un Miroir. Mais, dans des Matieres de Philoſophie, le Sentiment d’un Auteur tel que Bayle, ou Gaſſendi, eſt préférable au Témoignage de vingt Hiſtoriens, qui ne connoiſſent de la Nature des Cometes que ce qu’ils en ont lû dans quelques autres Hiſtoriens auſſi ſuperſtitieux qu’eux. Auſſi voïons-nous, que les Auteurs les plus eſtimez ſont généralement peu favorables aux Prodiges.