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mes s’occupent de nous : c’eſt vouloir être adoré, comme Dieu veut être adoré ; c’eſt à dire, en Eſprit & en Vérité.

Eh ! qu’auroit dit, grand Dieu, le Pere Mallebranche, ſi, pour prouver qu’un Homme avoit de la Vanité, Montagne eut fait tout-à-coup une Incurſion dans la Théologie la plus relevée, eut détaillé les Obligations de la Créature envers le Créateur, diſtingué les différentes Adorations, exterieures, apparentes, intérieures, & véritables ; décidé, que Dieu veut être adoré en Eſprit & en Vérité ; cité St. Jean, l’Apocalipſe, les Anges, les Apôtres : & tout cela, à cauſe qu’un Auteur n’a fait ſon Livre, que pour ſe peindre, & pour repréſenter ſes Humeurs & ſon Inclination ? Car, c’eſt à quoi le Pere Mallebranche en revient, après avoir jouï du Privilege de cette Imagination vigoureuſe & ſpacieuſe, qu’il accorde à Montagne ainſi qu’à tous les Pédans.

Il lui reproche encore de ſe contredire à tous momens, & dans un même Chapitre, lors même qu’il parle des Choſes qu’il prétend le mieux ſavoir. Pour juſtifier Montagne, je ne dirai que ce que dit le Pere Mallebranche peu de Lignes après cette