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dité. Il vaudroit autant que vous diſiés, que quelquefois la Matiere ceſſe d’être étendue. Cette derniere Propoſition n’eſt pas plus ridicule que l’autre. Car, enfin, ſi l’Extenſion eſt l’Eſſence de la Matiere, la Penſée eſt l’Eſſence de l’Ame. Je demande à ces Philoſophes, ſi diſpoſez à condamner ce qui combat leur Sentiment, qui leur à révélé la Nature de l’Eſſence d’une Subſtance dont ils n’ont qu’une Idée très confuſe ? Car, en concevant la Spiritualité, l’Eſprit borné de l’Homme ne conçoit preſque qu’une Négation de la Matiere, ſi je puis me ſervir de cette Expreſſion : & je ne crois pas qu’un Cartéſien aïe des Idées beaucoup plus claires de la Spiritualité, qu’un Gaſſendiſte du Vuide. Nous connoiſſons certainement par Expérience, que nous penſons quelquefois ; & nous ſommes en Droit de conclurre, qu’il y a quelque-choſe en nous qui a la Puiſſance de penſer : mais, d’aſſurer que nous penſons continuellement, nous ne pouvons le faire, qu’entant que l’Expérience nous en inſtruit. Nous ſavons, dit Locke, que l’Ame penſe toujours dans un Homme éveillé, parce que c’eſt ce qu’emporte l’Etat d’un Homme éveillé : mais de