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ſeau contienne ſon Eſſence délicate : ou bien il faut concevoir, quelque autre Choſe, qui, lui étant plus inſéparablement attachée, la conſerve & en empêche la Deſtruction. Ce qui n’eſt point, puiſque le Corps eſt le ſeul Vaiſſeau qui contienne l’Ame, & que ſon Union avec lui eſt ſi étroite, qu’elle n’eſt diſſoluble que par leur Perte mutuelle[1].

L’opinion des Epicuriens ſur la Mortalité de l’Ame étoit une Suite néceſſaire de leurs prémiers Principes. Il eut été abſurde de dire qu’une Choſe, que le Hazard avoit formée, devenoit une Subſtance éternelle & incorruptible ; puiſque, tout ce qui a eu un Commencement doit avoir néceſſairement une Fin, lorſque la Volonté Divine ne veut point lui accorder l’Immortalité. Or, les Epicuriens, qui n’admettoient la Di-

  1. Et quoniam Mens eſt Hominis Pars una, Locoque
    Fixa manet certo, velut Aures, atque occuli ſunt,
    Atque alii Senſus, qui Vitam cumque gubernant :
    Et veluti Manus, atque Ocrulus, Nareſve ſeorſum
    Secreta à nobis nequeunt ſentire, neque eſſe,
    Sed tamen in parvo linquuntur tempore tali :
    Sic Animus per ſe non quit ſine Corpore & ipſo
    Eſſe Homine, illius quaſi quod Vas eſſe videtur ;
    Sive atiud quidvis potis eſt conjunctus eii
    Fingere, quando quidem connexus Corporiadhæret.

    Lucretius de Rerum Naturâ, Libr. III, Verſ. 550.