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culté, que Dieu peut avoir créé l’Ame ſpirituelle, & avoir voulu qu’elle mourût avec le Corps. Toute Choſe, qui a eu un Commencement, peut avoir une Fin. Celui, qui a créé la Matiere de Rien, peut l’annihiler : & celui, qui a créé l’Eſprit, peut l’avoir créé mortel, ou le rendre tel, s’il le veut. Ainſi, en ſuppoſant que l’Ame fût ſpirituelle, nous n’aurions point encore de Preuve évidente qu’elle dût être abſolument immortelle, ſi la Révélation ne nous l’apprenoit : & l’Objection qu’on fait, que n’étant point compoſée, & n’étant point diviſible, elle ne peut être détruite, n’a de Force, qu’autant qu’on ſuppoſe que le Créateur a voulu qu’elle fût immortelle ; puiſque celui, qui crée de Rien une Choſe, ſoit ſpirituelle, ſoit corporelle, peut lui fixer un Tems où elle retournera à Rien : à moins qu’on ne ſe figure, qu’il faut beaucoup plus de Puiſſance pour créer un Etre, que pour l’annihiller, & que Dieu ait appris en confidence à certain Philoſophe juſqu’où va ſa Puiſſance.

Le Pere Mallebranche n’a donc pas dû parler avec autant de Mépris de Montagne, ſur ce qu’il ne voïoit pas