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le vrai, laquelle de ces deux Erreurs eſt la plus abſurde, d’admettre le Deſordre & la Confuſion pour le Principe de l’Ordre & de la Regle ; & de croire, qu’une Suite aveugle de ce Déſordre eſt la ſseule Choſe qui conſerve l’Arrangement : ou de ſe figurer, que chaque Partie de la Matiere eſt une Divinité, & qu’il y a autant de Dieu que d’Atomes dans l’Univers[1].

    Jour ; en éxaminant le Cours du Soleil, en le voïant paroître ſur notre Horizon, & s’acheminer à grands Pas vers les Antipodes, je m’écrirois : Je te ſalut, ô Haſard éternel, Dérangement incompréhenſible, Confuſion admirable, qui maintiens l’Ordre & l’Arrangement ! Souffre, que je te rende des Honneurs, que d’autres Mortels aveuglez, rendent à un Dieu tout bon, tout puiſſant, & tout ſage. » Lettres Juives, Lettre XXVIII, pag. 230.

  1. « N’est-ce pas de toutes les Choſes inconcevables la plus inconcevable, que de dire qu’une Nature, qui ne ſent rien, qui neconnoit rien, ſe conforme parfaitement aux Loix éternelles ; qu’elle a une Activité qui ne s’écarte jamais des Routes qu’il faut tenir ; & que dans la Multitude des Facultez dont elle eſt douée, il n’y en a point qui ne faſſe ſes Fonctions de la derniere Régularité ? Conçoit-on des Loix, qui n’aient pas été établies par une Cauſe intelligente : en conçoit-on, qui puiſſent être éxécutées réguliérement par une Cauſe qui ne les connoît point, & qui ne ſait pas même qu’elle ſoit au Monde ? » Bayle Continuation des Penſées diverſes ſur les Cometes, Tom. I, pag. 526.