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les moins ſolides ; &, lorſqu’ils ſont venus à bout de les détruire, ils paſſent légérement ſur les eſſentielles. Ils jettent ainſi de la Poudre aux Yeux du Vulgaire : &, par ce Moïen, rendent ſuſpectes toutes les Raiſons de leurs Adverſaires. Lorſqu’on veut donc prouver quelque Vérité, il faut s’attacher aux Argumens eſſentiels, ſaiſir la bonne & vraie Raiſon, s’y fixer, & ne s’en jamais départir. Elle ſeule eſt plus capable de convaincre, que lorſqu’elle eſt affoiblie par pluſieurs autres qui en offuſquent l’Evidence.

Le Conſentement général de tous les Peuples à reconnoître la Divinité, qu’on cite, non-ſeulement comme une Preuve de l’Idée innée de Dieu, mais même comme une Démonſtration évidente de ſon Exiſtence, eſt une Preuve, non-ſeulement ſoible & peu ſolide, mais même ſauſſe. Elle entraine d’ailleurs pluſieurs Abſurdites après elle, qu’on découvre dès qu’on l’éxamine avec Attention. En effet, ſi cette Preuve étoit bonne, elle auroit ſervi, & ſerviroit encore, à établir le Dogme impie & : abominable de la Pluralité des Dieux, & non pas l’Exigence d’un ſeul & vrai