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§. V.

Que ſi Dieu avoit empreint
ſon Idée dans notre Ame,
il l’eut empreinte net-
tement, et d’une Ma-
niere diſtincte.


Il eſt évident, que ſi Dieu avoit imprimé ſon Idée dans l’Ame de tous les Hommes, il l’eut gravée en des Caractéres ſi beaux, que nous euſſions tous ſçû ce que nous devions croire & penſer de cet Etre ſuprême. Et ceux, qui ſoutiennent les Idées innées, diſent eux-mêmes, qu’étant convenable à la Bonté de Dieu, que tous les Hommes aïent une Idée de cet Etre ſuprême, Dieu a gravé cet Idée dans leurs Ames. Il réſulte donc de leur propre Raiſonnement, que Dieu doit faire pour les Hommes tout ce que les Hommes croiront leur être le plus avantageux. Or, peut-on mettre en Doute, qu’il ne leur fût cent fois plus utile & profitable d’avoir une Idée nette & diſtincte de la Divinité, que celle qu’ils en ont, qui, la moitié du tems, ſert plus à les égarer, qu’à les con-