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n’a aucune Connoiſſance des Caracteres que Dieu a gravez dans ſon Ame, pour ſervir de Fondement à toutes les Notions qu’il peut acquérir, & à toutes les Réfléxions qu’il peut faire dans la ſuite ?

Il étoit donc inutile, que la Divinité imprimât dans l’Ame des Idées innées, dont elle devoit faire ſi peu d’Uſage, & qu’elle pouvoit acquérir autrement : & je ne crois pas qu’on ôſe outenir, que les Enfans aïent auſſi-tôt des Notions de cette Propoſition, Il eſt impoſſible qu’une Choſe ſoit & ne ſoit pas en même Tems, que de bien d’autres Véritez qui leur ſont connues.

J’ajouterai, avant de finir ce Chapitre, que s’il y avoit des Idées innées, elles devroient paroître avec plus d’éclat dans l’Eſprit des Idiots, des Enſans, & des Gens ſans Lettres, (où cependant l’on n’en voit aucune Trace,) que dans les autres Hommes, dont les Eſprits ſont altérez & corrompus par la Coutume, les Préjugés, & les Opinions étrangeres, & dont les Penſées ont pris une nouvelle Forme par l’Etude ; au lieu que celles des Enfans, des Idiots, & des Gens ſans Lettres, n’ont point été brouillées par le Mélange des Doctrines