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avec Raiſon, que ce Changement ne venoit que du Départ continuel des Atomes, qui, étant dans une perpétuelle Agitation, cherchoient à ſe délier les uns des autres, & à ſe mettre en Liberté dans l’Eſpace vuide qu’ils parcourent avec une extrême Rapidité, juſques à ce qu’ils ſe ſoient racrochés avec quelques autres. Ainſi, l’Augmentation de tous les divers Corps n’eſt produite que par un nouveau Ramas d’Atomes ; & la Ruine & la Deſtruction des autres, que par leur Deſenchainement, & leur Fuite. La Façon, dont les Parties principales d’un Corps ſenſible à nos Sens, viennent à ſe deſunir, peut nous donner une Idée de la Deſunion des premières Parties actives de la Matiere.

Il s’offre une Difficulté dans le Mouvement perpétuel qu’on accorde aux

    Cum tamen incolumis videatur Summa manere
    Propterea, quia quæ decedunt Corpora quoque,
    Und, abeunt, minuunt, quo venêre agmine donant ;
    Illa ſene fære ; at hæc contra floreſcere cogunt,
    Nec remorantur ibi. Sic Rerum Summa novatur
    Semper, & inter ſe Mortales mutua vivunt,
    Augeſcunt aliæ Gentes, aliæ minuuntur,
    In quo brevi Spatio mutantur Sæcla animantum,
    Et quaſi Curſores Vitaï Lampada tradunt.

    Lucretius, de Rerum Naturâ,
    Libr. I, Verſ. 66 & ſeqq.