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due. Or, puiſque cette Subſtance eſt infinie, & qu’il ne peut y avoir deux Infinis, je dois l’appeller Dieu, ou la Cauſe efficiente de tous les autres Etres, qui ne ſont que des Modes de cette Subſtance infinie, qui les produit tous elle ſeule, & qui les reçoit tous dans ſon Sein, lorſqu’ils changent de Figure, ou qu’ils ſont détruits.

Si cette Subſtance, continuoit Spinoſa, eſt infinie, & qu’elle ſoit par conſéquens néceſſairement Dieu, comme je l’ai fait voir par l’Impoſſibilité de deux Infinis, il faut néceſſairement qu’elle ait exiſté de tout Tems ; car, qui auroit pu la créer. Il ſeroit abſurde de dire, qu’un prémier Infini a créé un ſecond Infini. Ne pouvant ſubſiſter enſemble, à plus forte Raiſon l’un ne peut émaner de l’autre. Il faut donc encore néceſſairement que cette Subſtance étendue ait exiſté de toute Eternité, & qu’elle ait eu toutes ſes Qualitez ; celle de l’Intelligence, de la Production, du Mouvement, &c. Le Sentiment des anciens Philoſophes, qui faiſoient Dieu coëternel avec cette Subſtance étendue, & l’en diſtinguoient comme un Etre ſeparé, devient ridicule, & tombe de lui--