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me par les plus grands Efforts[1]. Ainſi, lorſqu’un Corps vient à être briſé, les Atomes, qui le compoſoient, n’en ſont point endommagés : ils ſe délient ſeulement les uns des autres, & ſe remettent en Liberté, ou vont s’accrocher à d’autres Corps qu’ils augmentent & grandiſſent, étant les prémiers Principes de tout ce qui éxiſte dans la Nature. Or, l’Atome ne peut être diviſé. C’eſt la derniere & la plus petite Partie de la Matiere, qui, à cauſe de ſa Solidité & de ſa Dureté, ne donne point lieu à la Diviſion. Ce n’eſt donc pas la Petiteſſe de l’Atome, qui le rend indiviſible, mais ſa Nature pleine & ſolide ; les Corps n’étant diviſibles & ſujets à la Diſſolution, que par le Vuide qui ſe trouve en eux ; lequel, donnant Entrée à quelque Force étrangère, occaſionne leur Ruine & leur Deſtruction.

Les Cartéſiens ſe récrient beaucoup ſur cette Définition de l’Atome. Il eſt aiſé de connaître, diſent-ils, qu’il ne peut

  1. Hæc quæ ſunt Rerum Primordia nulla poteſt Vis
    Stringere ; nam ſolido vincunt ea Corpore dermum.

    Lucretius de Rerum Naturâ, libr. I. Verſ. 480 & ſ.