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dis plus : c’eſt que la Réſiſtance, qu’ils oppoſeront au Mouvement, ſera immenſe, & ne pourra être ſurmontée que par une Force que nous n’avons point. Cependant, nous voïons, que, loin que nous aïons de la Peine à nous mouvoir, nous ſentons à peine qu’il y ait des Corps qui nous réſiſtent dans l’Air. Il faut donc, qu’il y ait de l’Eſpaces vuides pour les recevoir lors que nous les déplaçons : & il paroît étonnant, que, lorſque nous remuons le Doit, nous agitions tous les Corps juſqu’aux dernieres Limites de l’Univers ; ce qui doit néceſſairement arriver, ſi tout eſt plein, & qu’il n’y ait aucun Eſpace vuide.

Voilà Madame, ce que je penſe ſur l’Eſſence de la Matiere, l’Eſpace corporel, incorporel, & les petits Vuides répandus dans l’Intérieur du Monde, pour recevoir les Atomes, ou les Parties du Corps, les plus ſubtiles & les plus déliées. Ne croïez pas, cependant, que je ſois beaucoup plus perſuadé de l’Opinion des Gaſſendiſtes, que de celle des Cartéſiens. Il eſt vrai que je la trouve plus plauſible & plus probable : mais, j’ai eu l’Honneur de vous dire déjà, qu’il s’en falloit bien qu’une Choſe probable fut une Choſe évidente.