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Les Cartéſiens répondent à ces Objections, que le Mouvement ſe fait par la Facilité que les Corps ont de céder, les plus foibles & les plus mous aux plus durs & aux plus ſolides ; comme l’Air & le Feu cédent & font Place à nos Corps. Quoiqu’il n’y ait, diſent-ils, aucun Vuide répandu dans l’Eau, un Poiſſon avance librement, parce que qu’à meſure qu’il avance, il laiſſe de la Place par derriere, ou l’Eau coule & ſe retire par un Eſpece de Mouvement circulaire. Mais, cette Réponſe ne réſout pas la Difficulté. Car, il paroit que, s’il n’y a point de Vuide, il n’y aura pas la moindre Partie de l’Eau qui aïe le Pouvoir de commencer à ſe remuer, de céder, & de quitter ſa Place. Comment le Poiſſon pourra-t-il avancer, & agir, au milieu d’une Maſſe qui eſt également reſiſtante de tout Côté, remplie de Corps, qui, ne pouvant ſe pénétrer, ne doivent céder que par le Secours de certains Eſpaces vuides, qui puiſſent les recevoir[1]. Ainſi, loin que le Mou-

  1. Nam quò Squammigeri poterunt procedere tandem,
    Ni Spatium dederint Latices ? Concedere porrò
    Quò poterum Unda, cum Piſces ire nequibunt ?