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Aristote établit trois prémiers Principes, la Matiere, la Forme, & la Privation. Son Opinion a été ſuivie pendant long-tems, & même jurques à nos Jours, avec autant de Soumiſſion qu’on en avoit pour la Révélation. Tout Homme, qui auroit ôſé contredire au moindre Sentiment de ce Philoſophe, eut paſſé pour un Ignorant, ou un Novateur. Cependant, bien des Gens de Bon Sens ſentoient, & comprenoient, que les premiers Principes d’Ariſtote étoient auſſi incertains que ceux des autres, & peut-être même plus ridicules. Car, qu’y a-t-il de plus abſurde, que de faire entrer le Néant pour Principe des Choſes Naturelles ; & qu’eſt-ce la Privation, priſe comme Ariſtote l’entend, qu’un Rien, un Non-Etre, enfin le Néant ? Michel de Montagne, qui, n’en déplaiſe aux : Scolaſtiques, avoit autant de juſteſſe de

    y à des Parties dans l’Univers différemment animées ? N’avez-vous pas-là toutes les Horreurs, toutes les Monſtruoſitez, de l’Ame du Monde ? Plus de Guerres entre les Dieux, que dans les Ecrits des Poëtes ? Les Dieux Auteurs de tous les Péchés des Hommes ? Les Dieux, qui puniſſent, & qui commettent, les mêmes Crimes qu’ils ordonnent de ne point faire ? » Bayle, Continuation des Penſées diverſes, Tom. I, pag. 346.