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Philoſophes Païens ont eu de la Divinité, comme des Argumens démonſtratifs contre les Idées innées : mais, ce n’eſt point ici l’Endroit de montrer le peu de Réalité de ces prémieres Notions, qu’on veut que l’Ame apporte avec elle, & qui font ſi confuſes, ſi différentes dans les Hommes, & ſi inutiles pour connoître la Divinité, & le Culte qu’elle a ordonné. Je vous ferai ſeulement remarquer, Madame, combien il étoit difficile, que, par la Lumiere Naturelle, les anciens Philoſophes euſſent une Connoiſſance aſſez diſtincte de Dieu, pour pouvoir conclurre, qu’aïant été de tout Tems, il avoit, lui, Eſprit pur & ſimple, créé la Matiere.

Il ne peut point être facile à l’Homme, dit Bayle, de connoître clairement ce qui convient, ou ce qui ne convient pas, à une Nature infinie. Agit-elle néceſſairement, ou avec une ſouveraine Liberté d’Indifférence ? Connoît-elle, aime-t-elle, hait-elle, par un Acte pur & ſimple, le Préſent, le Paffé, l’Avenir, le Bien & le Mal, un même Homme ſucceſſivement juſte & pécheur ? Eſt-elle infiniment bonne ? Elle le doit être. Mais, d’où vient donc le Mal ? Eſt-elle immuable, ou change-t-elle ſes Ré-