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de quelque Lieu & de quelque Endroit que ce ſoit : & ſi les Corps & les Subſtances étoient créées de rien, toutes les Semences, ſi conſtamment ſpécifiées & déterminées, ſeroient inutiles. Toutes Sortes d’Animaux & de Plantes ſeroient produits au Hazard, par toutes Sortes de Semences. On en appercevroit perpétuellement ſortir du Néant de nouvelles, qui en produiroient encore au Hazard pluſieurs autres[1]. L’on voit, au contraire, un Ordre & un Arrangement parfait dans les Opérations de la Nature. Chaques Choſes prennent leur Origine de certaines Sources, d’où elles ſortent toujours ; & demandent leurs Semences, leur Matiere, leurs Meres, leurs Lieux, & leurs Diſpoſitions convenables. Les Bleds, les Herbes, les Fruits,

  1. Nam ſi de Nihilo fierent, ex omnibus Rebus Omne Genus naſci poſſet, nil Semine egeret. E Mare primum Hommes, e Terrâ poſſet oriri Squammigerum Genus, & Volucres erumpere Cælo, Armenta atque aliæ Pecudes, Genus omne Ferarum, Incerto Partu culta ac deſerta reneret. Nec Fructus iidem Arboribus conſtare ſolerent, Sed mutarentur, & ferre omnia poſſent. Quippe ubi non eſſent genitalia Semina quoque, Qui poſſet Mater Rébus conſiſtere certa ?
    Lucretius de Rerum Naturâ,
    Libr, I Verſ.160 & ſeqq.