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mettent en Mouvement. Ainſi, dans certaines Expériences, un Cartéſien en explique les Effets par le Secours de la Matiere ſubtile ; & les Gaſſendiſtes, par les Atomes & les petits Vuides. Il doit pourtant y avoir une grande Différence entre ces Façons différentes d’opérer. Mais, tous ces Secrets nous ſont cachés : nous ne commençons d’appercevoir les Choſes, que lorſqu’elles font preſque achevées[1]. La Nature reſſem-

  1. « Quelque loin que l’Induſtrie Humainne puiſſe porter la Philoſophie Expérimentale ſur les Choſes Phyſiques, je fuis tenté de croire, que nous ne pourrons jamais parvenir ſur ces Matieres à une Connoiſſance ſcientifique, ſi j’oſe m’exprimer ainſi ; parce que nous n’avons pas des Idées parfaites de ces Corps même, qui ſont les plus près de nous, & le plus à notre Diſpoſition… Nous n’avons, dis-je, que des Idées incomplettes, & fort imparfaites, des Corps… Peut-être pouvons-nous avoir des Idées diſtinctes de différentes ſortes de Corps qui tombent ſur nos Sens. Mais, je doute que nous aïons des Idées complettes d’aucun d’eux : &, quoique la prémiere Maniere de connoître ces Corps nous ſuffiſe pour l’Uſage, & pour le Diſcours ordinaire ; cependant, tandis que la derniere nous manque, nous ne ſommes point capables d’une Connoiſſance ſcientifique, & nous ne pourrons jamais découvrir ſur leur Sujet des Vérités générales, inſtructives, & entiérement inconteſtables. » Locke, Eſſai Philoſophique ſur l’Entendement Humain, Livr. IV) Chap. III pag. 703.