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ce, en diſant, Je ſens, donc je ſuis, qu’en diſant, Je Penſe, donc je ſuis. Si nous connoiſſons donc que nous exiſtons par l’Impreſſion de nos Sens, je crois que la prémiere Idée de l’Etre eſt produite en nous dans le même Inſtant que nous avons la prémiere Senſation qui fait paſſer dans notre Entendement la Perception de notre Exiſtence. J’ajouterai, que ſi nous n’acquérions pas nos Idées par le Moïen de nos Sens, & que l’Ame les formât d’elle-même, il faudroit qu’il y en eut un Nombre qui fuſſent innées avec elle ; ce que j’ai peine à me perſuader, & qui entraine après ſoi de grandes Difficultez, comme je le vous montrerai dans la ſuite. Car, tous ceux qui ſoutiennent, que nous avons des Idées innées, regardent celle de Dieu comme une des principales[1]. Je leur demande

  1. « Puis donc que … l’Idée de cet Etre Suprême n’eſt pourtant pas innée, comme je viens de le montrer évidemment, ſi je ne me trompe, je crois qu’on aura de la Peine à trouver aucune autre Idée qu’on ait droit de faire paſſer pour innée. Car, ſi Dieu eut imprimé quelque Caractere dans l’Eſprit des Hommes, il eſt plus raiſonnable de penſer, que ç’auroit été quelque Idée claire & uniforme de lui même, qu’il au-