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vons éxaminer avec ſoin leurs Sentimens, les réduire aux Regles de la Lumiere Naturelle, & voir s’ils n’ont rien de contraire à la Raiſon, avant de les adopter & de les recevoir pour véritables. En ſuivant cette Façon de lire les bons Livres, on profite véritablement ; & s’ils ne nous démontrent que bien peu de Choſes évidemment, du moins ce Peu vaut beaucoup mieux qu’un Nombre de Faits qui n’ont aucune Preuve eſſentielle. La Différence qui regne dans les Sentimens des Savans, l’Oppoſition qu’ils apportent mutuellement aux Opinions les uns des autres ; eſt la prémiere Preuve de leur peu d’Evidence. À peine un Auteur a-t-il mis un Ouvrage au Jour, qu’un Critique s’éleve contre lui, & en attaque pluſieurs Endroits ; & s’il ne les démontre pas évidemment faux, il met les Lecteurs, par les Doutes où il les jette, dans la Situation de ne pouvoir prononcer en faveur d’aucun Parti, ni décider de la Queſtion. Il arrive quelque fois, qu’un troiſieme Savant vient à la Traverſe, & condamne les deux Auteurs qui diſputent ; leur reprochant de n’avoir point entendu la Matiere qu’ils traittoient. Nouveaux Dou-