Page:D’Archiac - Introduction à l’étude de la paléontologie stratigraphique - Tome 2.djvu/580

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour que nous puissions apercevoir ses changements. Des nations entières disparaissent sans pouvoir conserver le souvenir de tout ce qui a eu lieu. C’est ainsi que les Égyptiens, habitant un pays présent du Nil, ont depuis longtemps oublié l’époque où, pour la première fois, ils ont occupé les régions graduellement mises à sec. Ces modifications auraient ainsi leur cycle périodique, leur hiver caractérisé par l’abondance des pluies, comme celles qui occasionnèrent le déluge de Deucation, aux environs de Dodone, et leur été marqué par une extrême sécheresse.

Suivant Censorinus, Aristote aurait voulu exprimer par cette époque de sécheresse une grande période cosmique, une conflagration du monde, et par l’hiver un cataclysme également universel ; mais rien ne justifie cette interprétation dans la philosophie d’Aristote, qui dit au contraire, dans le chapitre précité, que la terre n’est qu’un point sans importance en comparaison de l’univers entier, et qu’il serait ridicule de faire mouvoir les cieux pour une cause si minime. Le ciel est immuable, et rien n’autorise à voir dans les ouvrages du précepteur d’Alexandre l’idée d’une conflagration de l’univers ; on y voit, au contraire, relativement aux changements de la surface de la terre, l’influence des causes actuelles.

Aristote a nié le desséchement final des mers et combattu l’opinion de Démocrite ; mais le scholiaste d’Apollonius de Rhodes lui attribue la croyance que l’île de Schérie avait été N sur le point d’être réunie au continent. Le livre de Mundo, attribué au Stagirite, mentionne des inondations occasionnées par des pluies, d’autres produites par l’envahissement de la mer, l’émersion de portions couvertes jadis par les eaux, etc.

En admettant tous ces faits, on peut se demander si les Grecs n’ont pas attribué la succession des couches de la terre à ces changements produits par les causes actuelles. Mais en réalité cette succession n’a pu être comprise, comme nous l’avons vu, d’une manière complète, que par l’observation des corps organisés fossiles. Or, parmi les philosophes naturalistes des époques antérieures à Alexandre, ceux qui ont connu les fossiles, Xénophane,