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Voyage autour du Mont-blanc ─ Région au nord du Mont-Blanc

Après avoir essayé de donner une idée des recherches de de Saussure dans les parties qui avoisinent les Alpes centrales, ou qui les circonscrivent à une distance plus ou moins grande, nous passerons à ses excursions, exécutées à diverses reprises, dans le centre même de la chaîne et dont les résultats ont plus d’intérêt encore que les précédents.

« Le Mont-Blanc est une des montagnes de l’Europe dont la connaissance paraîtrait devoir répandre le plus de jour sur la théorie de la terre[1]. » Cette première phrase de la relation du voyage entrepris au mois de juillet 1778 montre bien toute la confiance qu’avait alors de Saussure dans l’étude des montagnes ; pour lui, comme pour bien des naturalistes de son temps, l’importance d’un phénomène se mesurait sur sa grandeur physique.

Dans ce voyage, alors qu’il n’avait encore aucune preuve directe du redressement des couches, l’étude des montagnes secondaires des environs de Bonneville, de Cluse, lui en fait bien naître l’idée ; mais il ne va pas au delà. Il y distingue des pierres brunes, feuilletées, des pierres grises, calcaires et argileuses, et rien de plus. La belle voûte de la cascade d’Arpenaz et quelques autres accidents semblables lui suggèrent la pensée qu’ils doivent leur disposition à l’action des feux souterrains. « Mais, dit-il (p. 399), malgré ces observations, ce n’est pas sans peine que j’ai recours à ces agents presque surnaturels, surtout quand je n’aperçois aucun de leurs vestiges ; car cette montagne et celles d’alentour ne laissent apercevoir aucune trace du feu. » D’autres exemples de dislocations plus compliquées, lui font encore dire (p. 401) : « La cristallisation peut seule, à mon avis, rendre raison de ces bizarreries. » Un peu avant Saint-Martin, les schistes ardoises alternent avec les lits de calcaires noirs. La direction et l’inclinaison des couches sont toujours constatées avec soin ; mais quelle pouvait en être l’utilité, dès que l’on croyait à la cristallisation ? à moins qu’on ne considérât les

  1. Voyage dans les Alpes, vol. I, seconde partie, p. 355, 1786.