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À quoi vous servirait ce zèle impétueux ?
Qu’à charger vos amis d’un crime infructueux.

Au reste, l’élection ne se fera de trois ou quatre mois, et nous tâterons doucement le gué, avant que de rien entreprendre. Je verrai Diderot, je reparlerai à Duclos, et nous nous concerterons avec vous, et je vous rendrai compte de la suite de nos démarches.

L’Écossaise a un succès prodigieux ; j’en fais mon compliment à l’auteur. Hier, à la quatrième représentation, il y avait plus de monde qu’à la première. On dit que Fréron avait prouvé, il y a quinze jours, dans une feuille, que cette pièce ne devait pas réussir. Je ne l’ai point encore vue ; et quand on m’en a demandé la raison, j’ai répondu que, si un décrotteur m’avait insulté, et qu’il fût mis au carcan à ma porte, je ne me presserais pas de mettre la tête à la fenêtre.

Quelqu’un me dit, le jour de la première représentation, que la pièce avait commencé fort tard ; c’est apparemment, lui dis-je, que Fréron était monté à l’hôtel-de-ville.

Un conseiller de la classe du parlement de Paris, dont on n’a pu me dire le nom, disait avant la pièce que cela ne vaudrait rien, qu’il en avait lu l’extrait dans Fréron ; on lui répondit qu’il allait voir quelque chose de meilleur, l’extrait de Fréron dans la pièce.

Ce n’est ni Bourgelat ni personne de ma connaissance qui a envoyé au Journal encyclopédique l’extrait de l’épître du roi de Prusse ; c’est apparemment quelqu’un de ceux à qui je l’ai lue, et qui en aura retenu ces bribes. Au reste, les endroits outrecuidans ne se trouvent pas dans l’imprimé, et j’en suis fort aise.

Savez-vous que votre ami Palissot a eu une prise très vive dans les foyers avec M. Séguier, qui avait pourtant fort protégé les Philosophes ? il trouvait, lui Palissot, que l’Écossaise était une chose atroce. À ce propos, je vous dirai que vos amis ne sont point contents de votre troisième lettre. Il ne faut point plaisanter avec de pareils gens, surtout lorsqu’ils s’enferrent d’eux-mêmes, comme Palissot a fait dans ses dernières réponses. Adieu, mon cher philosophe.


Paris, 2 septembre 1760.


Il y a un siècle, mon cher et grand philosophe, que je ne vous ai rien dit. Un grand diable d’ouvrage de géométrie, que je viens de mettre sous presse, en est la cause. Je profite du premier moment pour me renouveler dans votre souvenir.

La difficulté n’est pas de trouver dans l’Académie des voix