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propos les plus insolents et les plus infâmes. Elle ne l’ignore pas, non plus que M. d’Ayen, et tous deux ont regardé sa pièce comme une infamie.

7.o Je ne crois pas plus que tous que Diderot ait jamais rien écrit contre ces deux femmes ; ce qui est certain, c’est que personne n’avait plus à s’en plaindre que moi, et qu’assurément je n’ai rien écrit contre elles. Mais quand Diderot aurait été coupable, fallait-il, pour venger madame de Robeck, attaquer Helvétius et tous les encyclopédistes qui ne lui avaient fait aucun mal ?

8.o J’ai grande envie de voir le petit poème dont vous parlez. Je suis certain que feu Vadé a des héritiers auprès de Genève. Vous devriez bien vous adresser à eux pour me faire parvenir ce poème ; mais s’il n’y a rien sur la pièce des Philosophes, on ne sera pas content de feu Vadé.

9.o C’est très bien fait au chef de recommander l’union aux frères ; mais il faut que le chef reste à leur tête, et il ne faut pas que la crainte d’humilier des polissons protégés l’empêche de parler haut pour la bonne cause, sauf à ménager, s’il le veut, les protecteurs, qui au fond regardent leurs protégés comme des polissons.

10.o Avez-vous lu le mémoire de Pompignan ? il faut qu’il soit bien mécontent de l’Académie, car il ne lui en a pas envoyé d’exemplaire, quoiqu’il l’ait envoyé partout. Pour répondre à ce qu’il dit sur sa naissance, on vient, dit-on, de faire imprimer sa généalogie, qui remonte, par une filiation non interrompue, depuis lui jusqu’à son père.

11.o Tout mis en balance, le meilleur parti est toujours de finir par une phrase académique, je m’en… ; c’est aussi ce que je fais de tout mon cœur. Les sottises des hommes méritent qu’on en rie, et non pas qu’on s’en fâche.

Adieu, mon cher et grand philosophe ; j’attends votre catéchisme newtonien, et je ne vous ferai pas attendre dès que je l’aurai.


Paris, 18 juillet 1760.


Vous me paraissez persuadé, mon cher et grand philosophe, que je me trompe dans les jugements que je porte de certaines personnes ; je suis persuadé, moi, que vous vous trompez sur ces mêmes gens ; il ne reste plus qu’à savoir qui de nous deux a raison ; et vous m’avouerez du moins qu’il y a à parier pour celui qui voit les choses de près contre celui qui ne voit que de cent lieues.