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servira d’interprète), non comme ils le font sur la pénultième, mais sur l’antépénultième ; la tonique ou finale appuierait sur la pénultième, et la dernière serait presque muette : dites, pour éviter cet inconvénient, de ne terminer jamais le chant que sur des rimes masculines.

Adieu, mon cher et illustre maître ; voilà bien du bavardage. On m’a dit que Marmontel vous avait écrit le détail de la réception de Thomas ; elle a été fort brillante. Je crois comme vous que nous avons fait une très excellente acquisition. Iterum vale.


Paris, 6 avril 1767.


Je vous remercie, mon cher maître, de l’ouvrage de mathématiques que vous m’avez envoyé ; il aurait grand besoin d’un errata, étant rempli de fautes dont quelques-unes sont absurdes. Je désirerais fort que vous pussiez faire parvenir à l’auteur une douzaine d’exemplaires pour quelques bons mathématiciens de ses amis. J’imagine que la première partie de l’ouvrage aura été réimprimée en même temps que le supplément, sur l’exemplaire que vous avez reçu corrigé de la main de l’auteur : il se flatte que les imprimeurs y auront moins fait de bévues que dans l’impression du manuscrit.

Le cinquième volume de mes Mélanges ne paraît point encore ici, grâce à la négligence de l’imprimeur Bruyset de Lyon, qui n’en a point encore envoyé. Les matières que j’y ai traitées, et la manière dont elles le sont, me mettront à l’abri de la criaillerie des fanatiques, qui devient ici plus odieuse et plus importune que jamais. Cette vermine est une vraie plaie d’Égypte, et qui par malheur a l’air de durer longtemps. Ils sont actuellement aux trousses de Marmontel qui, je crois, s’est trop avancé avec eux, et qui aura de la peine à s’en tirer. Ils ont écrit un gros volume de censures pour expliquer, ou plutôt pour embrouiller leur barbare et ridicule doctrine. J’ai lu avec grand plaisir une certaine anecdote sur Bélisaire, où cette maudite et plate engeance est traitée comme elle le mérite. J’aurais voulu seulement que l’auteur eût ajouté un petit compliment de condoléance à la Sorbonne, sur l’embarras où elle doit être au sujet du sort des païens vertueux ; car, si ces païens sont damnés, Dieu est atroce ; et s’ils ne le sont pas, on peut donc à toute force être sauvé sans être chrétien. Damnés ou sauvés, Dieu nous garde d’être en l’autre monde dans la compagnie des docteurs !

Votre ami Jean-George de Pompignan, par la permission