à ce qu’on m’a assuré, répandait sourdement que vous lui aviez fait faire des propositions de paix. J’ai prétendu que, si vous lui en aviez fait, c’était apparemment comme Sganarelle en fait à sa femme après l’avoir bien battue. En attendant, maître Aliboron est allé faire les délices de la cour de Deux-Ponts, et il a laissé ses feuilles à fabriquer, pendant son absence, à quelques sous-marauds qui sont à sa solde ; on prétend même qu’il va les quitter tout-à-fait pour être bailli ou maître d’école dans quelque village d’Allemagne. Ou assure aussi que le duc de Deux-Ponts, son digne ami et protecteur, qui a joué un rôle si brillant dans la dernière guerre à la tête des troupes de l’Empire, doit l’emmener à la cour de Manheim qui se prépare à le fêter beaucoup, et qui apparemment a oublié l’honneur que vous avez fait, il y a quelques années, au maître de la maison.
Ce sont, je crois, de plates gens que tous ces petits principiaux d’Allemagne, et je me souviens que quand le roi de Prusse me demanda si, en retournant en France, je m’arrêterais dans toutes ces petites cours borgnes, je lui répondis que non, parce que quand on vient de voir Dieu, on ne se soucie guère de voir S. Crépin.
Savez-vous que je viens de recevoir de l’impératrice de Russie une lettre qui devrait être imprimée et affichée dans la salle du conseil de tous les princes ? elle me dit ces propres paroles : On devrait faire dans tout gouvernement éclairé une loi qui défende aux citoyens de s’entre-persécuter, de quelque façon que ce soit… Les guerres de plumes qui, en décourageant les talents, détruisent le repos des citoyens sous le misérable prétexte de quelque différence d’opinion, sont aussi détestables que minutieuses...... Vous me dites, ajoute-t-elle, que le Nord donne des leçons au Midi : mais d’où vient donc que vous autres peuples du Midi, passez pour si éclairés, si les règles les plus naturelles et les plus simples n’ont pas encore pris racine chez vous ? ou est-ce qu’à force de raffinement elles vous ont échappé ? Comme elle vient de réunir au domaine de la couronne tous les biens du clergé, elle ajoute très plaisamment : Chez nous on respecte trop le spirituel pour le mêler au temporel, et celui-ci se prête à soulager l’autre des vanités qui lui sont étrangères. Avouez, mon cher philosophe, que tous les princes et princesses, sans en excepter le duc de Deux-Ponts, ne sont pas aussi avancés ; mais, comme dit très-bien la sainte Écriture, l’esprit souffle ou il veut. Je ne sais de quel côté le vent va souffler pour la philosophie. Voilà déjà des parlements qui concluent à garder les jésuites, j’ai bien peur que ce ne soit enterrer le feu sous la cendre. Je ne