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rigéné. Je ne désespère pas de lui en dire quelque chose un jour plus solennellement que je n’ai fait, au risque d’être excommunié au Puy en Velay.

Tandis que j’écris des lettres obscures à ce plat monseigneur, il en est un qui mérite ce titre mieux que lui, et à qui vous devriez écrire une lettre ostensible, pour le remercier au nom de nous tous de la manière honnête dont il se conduit avec les gens de lettres : c’est M. le prince Louis de Rohan, qui serait certainement très flatté de recevoir de vous cette marque d’estime, et d’autant plus flatté qu’il n’a aucune liaison avec vous. Si vous pouviez même joindre à votre lettre quelques vers (vous en faites bien pour MM. Simon et George Le Franc), le tout n’en irait que mieux. Vous devez bien être sûr qu’il a pour vous tous les sentiments que vous pouvez désirer, et qu’il n’est pas du nombre des fanatiques qui ont mis dans leurs intérêts les commis de la poste.

À propos d’Académie, ne croyez pas que moi et quelques autres de vos amis exigions la plate souscription de très humble et très obéissant serviteur[1] : la pluralité l’a emporté, et je pense qu’attendu le sot public, le contraire eût peut-être fait tenir de plats discours, et que vous ferez mieux de suivre l’usage ; mais, à l’égard de votre nom, il me paraît indispensable pour vous, pour l’Académie, pour le public et pour Corneille.

Je ferai chercher ce livre de du Marsais dont je n’ai aucune connaissance ; c’était un grand serviteur de Dieu. Je me souviens du compliment qu’il fit au prêtre qui lui apporta les sacrements, et qui venait de l’exhorter : Monsieur, je vous remercie ; cela est fort bien ; il n’y a point là dedans d’alibiforains. Je vous remercie, de mon côté, de la lettre de votre secrétaire à celui de Simon Le Franc. Je ne doute point qu’en la lisant Simon Le Franc ne s’écrie :

Quid domini facient, audent cum talia fures ?

Je vous remercie aussi d’avance de tous les contes de ma Mère l’oie, que je compte à présent recevoir de la première main ; car je n’imagine pas que l’intolérance s’étende jusqu’à empêcher les oies de conter, à moins que la philosophie, dont ils ont tant de peur, ne s’avise de se comparer aux oies du Capitole, à qui les Gaulois se repentirent bien de n’avoir pas coupé le cou.

Voilà l’archevêque de Paris qui voudrait bien rejoindre le cou des jésuites avec leur tête que les Gaulois du parlement en ont séparée. Il a fait, pour leur défense, un grand diable de mande-

  1. Dans la préface des Commentaires sur Corneille.