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défaite, déroute.

Ces mots désignent la perte d’une bataille, faite par une armée, avec cette différence que déroute ajoute à défaite, et désigne une armée qui fuit en désordre et qui est totalement dispersée.

défendre, soutenir, protéger.

Ces trois mots signifient en général l’action de mettre quelqu’un ou quelque chose à couvert du mal qu’on lui fait ou qui peut lui arriver.

On défend ce qui est attaqué ; on soutient ce qui peut l’être ; on protège ce qui a besoin d’être encouragé.

Un roi sage et puissant doit protéger le commerce dans ses États, le soutenir contre les étrangers, et le défendre contre ses ennemis. On dit, défendre une cause, soutenir une entreprise, protéger les sciences et les arts. On est protégé par ses supérieurs ; on peut être défendu et soutenu par ses égaux. On est protégé par les autres ; on peut se défendre et se soutenir par soi-même.

Protéger suppose de la puissance, et ne demande point d’action ; défendre et soutenir en demandent, mais le premier suppose une action plus marquée.

Un petit État, en temps de guerre, est ou défendu ouvertement, ou secrètement soutenu, par un plus grand, qui se contente de le protéger en temps de paix.

défendu, prohibé.

Ces deux mots désignent en général une chose qu’il n’est pas permis de faire, en conséquence d’un ordre ou d’une loi positive. Ils diffèrent en ce que prohibé ne se dit guère que des choses qui sont défendues par une loi humaine et de police.

La fornication est défendue ; et la contrebande, prohibée.

déguisement, travestissement.

Ces deux mots désignent en général un habillement extraordinaire, différent de celui qu’on a coutume de porter : voici les nuances qui les distinguent.

Il me semble que déguisement suppose une difficulté d’être reconnu, et que travestissement suppose seulement l’intention de ne pas l’être, ou même seulement l’intention de s’habiller autrement qu’on n’a coutume.

On dit d’une personne qui est au bal, qu’elle est déguisée ; et d’un magistrat habillé en homme d’épée, qu’il est travesti.

D’ailleurs déguisement s’emploie quelquefois au figuré, et jamais travestissement.