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conviction, persuasion.

Quoique ces deux mots s’emploient souvent l’un pour l’autre, ils ont pourtant des nuances qui les distinguent. La conviction tient plus à l’esprit, la persuasion au cœur ; ainsi l’on dit : l’orateur doit non-seulement convaincre, c’est-à-dire, prouver ce qu’il avance, mais encore persuader, c’est-à-dire, toucher et émouvoir. La conviction suppose des preuves : je ne pouvais croire telle chose ; il m’en a donné tant de preuves qu’il m’en a convaincu. La persuasion n’en suppose pas toujours : la bonne opinion que j’ai de vous, suffit pour me persuader que vous ne me trompez pas. On se persuade aisément ce qui fait plaisir ; on est quelquefois très-fâché d’être convaincu de ce que l’on ne voulait pas croire. On dit : je suis persuadé de votre amitié, et bien convaincu de sa haine.

On persuade à quelqu’un de faire une chose, on le convainc de l’avoir faite ; mais, dans ce dernier cas, convaincre ne se prend jamais qu’en mauvaise part : cet assassin a été convaincu de son crime ; les scélérats avec qui il vivait, lui avaient persuadé de le commettre.

coutume, usage.

Ces mots désignent en général l’habitude de faire ; on dit les usages d’un corps et la coutume d’un pays ; on dit encore avoir coutume de faire une chose et être dans l’usage de la faire. Telle personne a de l’usage ; tel mot n’est pas du bel usage.

cri, clameur.

Le dernier de ces mots ajoute à l’autre une idée de ridicule par son objet ou par son excès. Le sage respecte le cri public et méprise les clameurs des sots.

crime, faute, péché, délit, forfait.

Faute est le mot générique ; avec cette restriction cependant qu’il signifie moins que les autres, quand on n’y joint point d’épithète aggravante. Péché est une faute contre la loi divine, délit est une faute contre la loi humaine ; crime est une faute humaine ; forfait ajoute encore l’idée du crime, soit par la qualité, soit par la quantité, car forfait se prend encore plus souvent au pluriel qu’au singulier. J’ai puni ses forfaits.

critique, censure.

Critique s’applique aux ouvrages littéraires ; censure aux ouvrages théologiques, ou aux propositions de doctrine, ou aux mœurs.